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Nota bene: en raison de l’aggravation de son état de santé, Miss Cloclo, alias Clothilde Alexandra, a dû mettre un terme, à son plus grand regret, à la création de capsules humoristiques; l’interprétation exigeant d’elle une somme d’énergie dont elle se sent désormais incapable. Elle a décidé, en contrepartie, d’ajouter à ce site un volet littérature; où elle s’exprime, sans pudeur, sur une problématique délicate dont on entend peu parler par ceux-là même qui en sont l’objet: l’aide médicale à mourir.
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Tant que y’a la mort… y’a de l’espoir !
Cette publication fait suite au post précédent, où je proposais un ancien texte, de ma plume, intitulé « Les zzzzz’athées ». Or, de celui-ci avaient été intentionnellement omis de ma part les deux premiers paragraphes originaux… que je présenterai donc ici en guise d’introduction à cette seconde partie.
« Pourquoi tous ces ‘Z’ accolés au mot “athées“ ? Eh bien, ne s’agit-il pas de l’onomatopée utilisée en bandes dessinées pour signifier qu’un personnage est plongé en plein sommeil ?… Certes, mais encore ?… He, hum… pour être tout à fait franche, leur discours me semble assommant, razzzzzant… si ce n’est: à dormir debout !
Heu… ou serait-ce plutôt que leur conception de la mort est pour moi source potentielle de cauchemars ? Qu’elle vient brizzzzzer le seul rêve… le seul rêve éveillé toujours à ma portée ? L’unique perspective que j’ai d’une “vie“ meilleure ? Que les zzzzz’athées se révèlent à ce titre des zzzzz’éteignoirs… des zzzzz’éteignoirs de lueur… de lueur d’espoir ! »
Bah… j’imagine que cette explication peut paraître un brin tirée par les cheveux, non ? N’en demeure pas moins que je suis tourmentée à l’idée que la mort ne consiste qu’en une sorte « d’Alzheimer » abrupt et sans pitié.
Quoique le « sommeil éternel », comme on l’appelle parfois, soit terrifiant pour quiconque, peu importe ses croyances. Après tout, plus encore qu’un passage obligé, il s’agit d’un aller simple vers le pire des inconnus. Sauf, évidemment, pour un soi-disant Jésus !
Cependant, quant à moi, ce qui me terrorise davantage que la « Grande Faucheuse » – ou pour mieux dire: que celle telle que définie par les zzzzz’athées – en somme, mon cauchemar suprême, ce serait de rester trente ou quarante ans encore l’esclave de ce monstre de torture qu’est devenu mon corps.
Ce qui m’amène ainsi à révéler qu’en ce qui me concerne, je ne suis ni très vieille, ni atteinte d’une pathologie forcément mortelle. J’ouvre ici une toute petite parenthèse… quoique peut-être un tantinet chiante… pour préciser que de dévoiler la nature exacte de mes troubles de santé me semble secondaire pour l’instant. Je me contenterai simplement de souligner qu’ils incluent diverses douleurs incessantes, et particulièrement intenables; et que si ce n’était de ce coup de grâce qui me sera bientôt octroyé, je pourrais bel et bien devoir subir pendant plusieurs décennies supplémentaires les sévices de mon propre « véhicule de chair ».
Pour tout avouer, je réalise, en enchaînant ces lignes, éprouver un certain malaise à ne nommer ne serait-ce qu’un seul symptôme spécifique parmi tous ceux qui m’accablent. Je n’ai pas l’habitude de m’apitoyer sur mon sort; mais il m’apparaît difficile d’évoquer les raisons derrière sa propre euthanasie sans avoir l’air de le faire. D’un autre côté, je trouverais absurde de me mettre à minimiser la sévérité de mon état sous prétexte que je redoute qu’on m’impute à tort une volonté d’attiser la pitié. Fin de ladite parenthèse… peut-être un tantinet chiante ! 😉
Sinon, ce qu’il faut tout de même savoir, pour la compréhension de l’actuelle publication, c’est que la maladie m’a frappée à un très jeune âge, soit presque au sortir de l’adolescence. Avec la santé, j’ai depuis l’impression que c’est une partie de ma vie – voire ma vie entière – qui m’a alors été volée. Parce que toutes les sphères sont susceptibles d’en être affectées.
Ma condition physique est demeurée plus ou moins stable au cours des années suivantes… jusqu’à ce que, plus récemment, elle ne s’aggrave et ne finisse par être carrément invivable – et je pèse mes mots: invivable. Tant et si bien qu’après moult tergiversations et gouttes de sueurs froides, l’unique option concevable pour moi fût de m’affranchir de mon bourreau de corps par la mort.
Et ce, au risque, ainsi donc, d’être confrontée beaucoup plus tôt que prévu à cette perspective, néanmoins troublante: celle de sombrer définitivement, lors de mon dernier souffle, dans un inexorable néant… conformément à la vizzzzzion des zzzzz’athées.
Car c’est bien cette éventualité, n’est-ce pas, que désormais je crains: qu’aux confins de cette existence-ci, il ne s’y trouve rien ?… rien qu’une éclipse de l’âme ?
Autrement, dans le meilleur des scénarios, notre monde débouche sur une quelconque Au-delà… dans lequel cas, une fois décédée, j’en serais sans doute agréablement surprise… aux anges, même… et littéralement !
Or, quand j’y réfléchis bien, à suppozzzzzer que les zzzzz’athées aient raizzzzzon, que notre séjour sur Terre n’aboutisse effectivement à rien de rien… le moment venu, je n’en aurais même pas conscience, de sorte que je ne serais pas déçue.
Ce qui signifierait… heu… que quoi exactement ?… qu’au pis aller, dans l’expectative, j’aurais eu peur… de rien ? Ou pour rien ?
En bien justement, tiens !… en définitive, d’ici le « Jour J », si je dois choisir entre la peur – surtout « de rien », ou « pour rien » – et l’espoir… je préfère encore nourrir ce dernier sentiment.
Une disposition d’esprit que je pourrais reformuler en ces termes: tant que dans ma tête subzzzzziste la vie… oups ! pardon: l’avis… la vizzzzzion des zzzzz’athées sur la mort… y’a que du noir; mais heureusement, dès lors qu’il y existe cette deuxième chance, cette re-naissance, cette délivrance… cette fenêtre avec vue sur une liberté absolue… cette utopie qui m’attend de l’autre côté de la rive… l’univers enchanté de tous les possibles… y’a de l’espoir !
De toute façon, je n’ai rien… rien à perdre… même pas la vie. On va « m’enlever la vie », comme on dit ?… Alors soit ! Encore faudrait-il que j’en ai une…. moi, dont la vie sociale – tiens, encore le mot « vie » ! – se résume maintenant, dû à certaines « incapacités physiques », à des rendez-vous médicaux… l’un après l’autre… après l’autre… après l’autre: POUAH !
Je préfère de loin que mon existence aboutisse à un cul-de-sac à cette seconde tapante… plutôt que de voir mes déplacements réduits à seulement quelques kilomètres de distance… et à plus forte raison de peine et de misère, poussée en chaise roulante… à la rencontre d’indésirables médecins.
Avec mon teint cadavérique, mes joues et mes cernes creux, ainsi que ma silhouette amaigrie par la maladie… j’ai beau avoir déjà l’air d’une moribonde; tout au fond, à l’intérieur, je n’ai jamais cessé d’être pleine d’élan !
Moi, ce que je veux, c’est parcourir tous les pays du monde !… Sentir le parfum vivifiant de l’eau de mer. Défier les vagues puissantes des océans. Tenter de communiquer avec des singes et des dauphins… Boire du bon vin jusqu’au petit matin. Me faire faire la cour par de beaux Italiens. Me faire faire l’amour avec des préliminaires sans fin !
Ou mieux encore, qui sait: jouer à Superman autour de la Terre ! Me saouler à grands coups de bouffées d’atmosphère ! Me bâtir une maison sur un rayon de soleil !… Puis, me propulser le plus loin possible dans le ciel: traverser la stratosphère… la Voie lactée… le long tunnel… afin d’atteindre l’ultime état d’apesanteur… et de faire mon entrée solennelle dans la Lumière… oui: dans la Lumière !
Si je ne suis pas maître de ma vie, je vais au moins l’être de ma mort.
Quand je pense que certains médecins – et sur la seule base d’une « fatigue inexpliquée »… en excluant tous mes autres symptômes – ont tenté de m’imposer un diagnostic de dépression pendant près de dix ans… jusqu’à presque me convaincre c’était vraiment le cas… alors que je suis tout le contraire d’une dépressive.
J’ajouterais ici qu’il faut avoir aimé profondément la vie pour avoir été à ce point souffrante physiquement, et aussi longtemps, sans attenter à ses jours. Ni pratiquement jamais s’en plaindre, du reste. Et pardonnez-moi si je donne l’impression de le faire en cet instant même.
On peut vouloir mourir parce que notre état de santé est invivable. Ou parce que notre corps de torture nous prive de la possibilité de jouir de la vie. Ou, pour mieux dire: parce que, tout bonnement, on n’a plus de vie. Et qu’on rêve qu’il s’en trouve une autre meilleure après celle-ci. Et qu’on prie pour y être admis. Bref, on peut vouloir mourir… dans l’espoir de vivre !
Quel beau paradoxe que voilà, n’est-ce pas ? Quoi qu’il en soit… alléluia !… je me croise les doigts: dans son Royaume, s’il existe, que Dieu m’y emporte… m’en ouvre les portes ! 🙂
À bientôt xxx
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